Samedi dernier s’est ouverte la 19e édition du Festival du cinéma africain de Khouribga, en présence du président du jury, le philosophe et sociologue
Edgar Morin, du Président du Fcak, Noureddine Sail, et de plusieurs représentants du 7e art venus de plusieurs pays, ainsi que des autorités de la
commune de Khouribga. Un hommage exceptionnel a été rendu à Tahar Cheriaa, père du panafricanisme cinématographique et fondateur des Journées cinématographiques
de Carthage, premier festival de cinéma en Afrique et dans le monde arabe.
Sans folklore, sans tambour ni trompette. Juste des orateurs et un programme d’ouverture axé sur le cinéma. C’est la nouvelle configuration que les organisateurs
ont voulu donner au 19e Festival du cinéma africain de Khouribga (Fcak), une édition placée sous le signe de la cinéphilie. L’évènement qui rendait
également hommage au fondateur des Journées cinématographiques de Carthage, a surtout permis de voir ou de revoir le film documentaire «Tahar Cheriaa
à l’ombre du Baobab» de Mohamed Challouf. Selon, Edgar Morin, «C’est une oeuvre qui donne en modèle deux grands pionniers du cinéma africain: Tahar
Cheriaa et Ousmane Sembène». Il a indiquéque «dans ce documentaire nous voyons les difficultés de ce cinéma pourtant si créatif», avant de noter que
le cinéma africain ne s’impose malheureusement pas dans les salles, au vu des obstacles qu’il rencontre. «En France, il y a eu une pénétration difficile
du cinéma asiatique mais le cinéma africain n’a pas encore bien pénétré, bien qu’au festival de Cannes, il y a eu dans le jury deux Africains et en
dépit du fait qu’il y a de très nombreux spectateurs, aussi bien du nord de l’Afrique que de l’Afrique subsaharienne», a expliqué le sociologue qui
note qu’il y a une «résistance culturelle» qui se manifeste par l’organisation de festivals comme celui de Khouribga.
«Bien entendu, on peut intégrer des aspects venus de l’occident, de la modernité, mais il faut sauver la valeur la plus grande de ces cultures, qui n’est
pas seulement ses originalités, ses poésies, sa musique, mais aussi ses solidarités, ses sens des relations humaines, qui sont si forts en Afrique.
Contrairement à ce qu’a dit un président français, l’Afrique a une histoire très riche. Nous humains, nous sommes formés dans la forêt africaine?

L’humanité s’est formée au coeur de l’Afrique», a clamé du haut de la tribune Edgar Morin. Le nonagénaire encore très jeune d’esprit, a ajouté: «Nous
devons beaucoup à l’Afrique et surtout, nous devons sauvegarder sa vie et sa culture». Il considère que «l’Afrique doit se défendre, mais aussi, les
amis de l’Afrique doivent la défendre. Et le cinéma est un moyen de défense parce que c’est un moyen de connaissance».
Invitant l’homme africain à une démarche de «résistance», le président du jury de la 19e édition du Fcak, précise que le cinéma est un moyen majeur de
défense des valeurs. «L’émotion esthétique que donnent les beaux films donne également la connaissance de l’humanité de ces pays qui sont si lointains
et que nous n’avons pas l’occasion de connaître», analyse-t-il.
L’unité de l’espèce humaine
Edgar Morin a, dans son intervention très applaudi du public, appelé à «l’unité de l’espèce humaine». Il a expliqué: «J’aime beaucoup voir les films étrangers,
parce que c’est une façon de plonger dans nos sociétés?pour sentir ce qui se passe dans le monde», précisant que le cinéma est l’un des éléments essentiels
pour découvrir le monde et comprendre la société. «Ce qui se passe aujourd’hui, avec la destruction de la biosphère dont on dégrade la diversité,
c’est ce qui se passe aussi sur le plan humain. Cette diversité n’est rien sans l’unité humaine», a conclu le philosophe et sociologue français, qui
dans le passé, a «développé ses premières notions humanistes» grâce à des films surtout soviétiques et allemands, tels que Le chemin de la vie, Les
Marins de Kronstadt, La Tragédie de la mine, L’Atlantide.
Source:Sene360